Balanchine en noir et blanc : prélude d’une américaine saison parisienne

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Si vous avez assisté à la soirée vous n’avez pu que me remarquer tellement j’ai été l’élément totalement atypique que vous avez pu croiser dans cette représentation regroupant des ballets emblématiques ou du moins totalement caractéristiques du style de Georges Balanchine. Balanchine ? mais si ! vous savez, ce chorégraphe russe ayant bâti sa carrière aux States à partir des années 20, une sorte d’Anna Wintour de la chorégraphie néo classique, un fétichiste du décor fait d’un cyclo bleu qui vous rappelle vos dernières vacances à Santorin, celui qui quand la compagnie n’est pas en tutu colle aux gars des chaussettes blanches remontées jusqu’au dessus des chevilles et met ses danseuses en collant académique genre oui un rien m’habille et je suis gracieuse même dans un bout de polyester/élastane. Bon vous avouerez que pour le premier ballet, le plus ancien ce soir de sa prolifique production, il était encore à tâtonner quant aux tenues à adopter … tellement indécis que finalement le gars se trouve à moitié à poil … Bon en même temps, le gars c’est Apollon, donc il peut se le permettre. Sauf que Apollon ce soir c’est Chase Finlay … prototype du beau gosse américain … et il sait !

movement-1-jumboc’est là tout le problème, si la vidéo à laquelle vous pouvez accéder ici peut séduire et laisser penser que cet Apollon là va nous procurer un beau spectacle ce n’est définitivement pas le cas sur scène où le garçon peine à irradier au delà du premier rang.  Et je vous avoue que posé là sur scène à attendre qu’il vienne m’effleurer de son fessier rebondi pour regarder ses muses se mettre en quatre pour les séduire et bien j’ai trouvé le temps long. Chase Finlay est joli garçon ; c’est surement pour cela que son directeur le distribue dans ce rôle … Contrairement à Chase, Apollon est la beauté universelle : il n’a pas besoin du regard des autres pour être beau .. et cela change tout ! L’Apollon présenté, n’est pas le dieu des arts il est un modèle sur papier glacé qui se concentre sur la seule idée de se présenter sous l’angle le plus favorable, sous l’éclairage le plus flatteur. Ce dieu est un selfie ambulant, froid, inexpressif et sans charisme: un Apollon Abercrombie & Fitch en quelque sorte. L’antipode de la beauté solaire et intrinsèque de l’Apollon surement voulu par Balanchine. Et je peux me sentir flatté qu’il ait daigné venir se reposer sur moi … cela m’a aussi permis de me concentrer sur les variations des trois muses soudainement délivrées de la froideur contagieuse dégagée par ce garçon. Sterling Hyltin est Terpsichore, Ashly Isaacs est Polymnie et Lauren Lovette est Calliope. La première sort vraiment du lot  mais chacune apportera la dose d’inspiration qui manque dès que le bellâtre entre en scène. J’ai attendu qu’il soit parti pour m’exprimer car sinon il m’aurait envoyé au rebut et je n’aurais peut être pas fait parti du voyage retour .. d’autant que comme vous l’avez vu ce soir on ne s’embarrasse pas de décors et accessoires au NYCB en présentant Balanchine en noir et blanc. C’est pour ça que vous avez forcement du me remarquer posé au milieu de la scène .. je suis le cube blanc, seul élément de décor, sur lequel Apollon vient poser ses fesses pour se reposer … donc quand même je suis une star à ma façon parce que j’en ai fait se reposer des fesses d’Apollon et j’en ai vu défiler quelques uns de jarrets olympiens !! mais celui là n’est pas mon préféré ! et en plus la musique manquait terriblement de transparence dans une direction pâteuse d’Andrew Sill 

Si vous aimez le ballet pour ses décors, ben c’est foutu ! ça y est déjà on me remet dans une caisse avec les trois babioles des muses … et c’est fini pour la soirée.. vous n’aurez désormais droit qu’à une scène vide ! Allez je prends mes neuroleptiques et redevient le vicomte  !

The Four tempéraments voit apparaitre sur scène, après la présentation du thème par 3 couples assez homogènes (parmi eux Justiiiiiin Peck, coqueluche de la balletosphère), des danseurs d’un autre niveau : Robert Fairchild y est magistral dans Melancholic maitrisant sa ligne, alliant tension et relâchement de son corps avec une sensualité incroyable.

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Sarah Mearns est elle aussi une pépite de la compagnie et donne à Sanguinic tout son piquant. Amar Ramasar déroule une jolie variation dans Phlematic en compagnie de 4 filles plutôt convaincantes. Le travail sur le mouvement du chorégraphe est vraiment bien  rendu et l’on sent que danser Balanchine est pour cette compagnie aussi naturel que respirer et cela apporte un côté spontané et une lisibilité à cette oeuvre qui ne m’avait jamais trop parlé et que curieusement ce soir je trouve passionnante.

Duo concertant  devient un passionnant duo / face à face entre Megan Fairchild et Anthony Huxley qui semblent improviser sur un duo pour violon et piano de Stravinsky interprété à leurs côtés sur la scène. Alternent des moments où les danseurs écoutent et d’autres où ils évoluent comme un mouvement permanent parfois vif, parfois plus alangui mais toujours avec des lignes d’une grande pureté. Un vrai moment de bonheur , comme une coupe de champagne bien frappé au milieu du programme.

Symphony in three movements sera de trop pour moi dans ce programme. Cette symphonie marquée par des effets de cheveux dignes d’une pub pour Loréal met en évidence la disparité qui existe dans la compagnie américaine avec un corps de ballet très hétérogène en taille, gabarit, endurance aussi … N’étant pas un fan absolu de Balanchine les trois ballets précédents m’avaient permis d’atteindre mon quota de poignets cassés, mains et bras en forme d’aile de mouette morte , glissés et jetés revus et corrigés. La partition difficile de Stravinsky n’aidant pas j’avoue que j’ai lâché prise sur ce dernier élément du programme qui m’a paru très sportif et survitaminé … beaucoup trop pour une fin de soirée.

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Soirée Balanchine en noir et blanc New York City Ballet Théatre du Chatelet Vendredi 8 Juillet 2016

Crédit photos NYCB

 

 

 

Un commentaire

  1. Sylvie dit :

    Attention ! vous avez rédigé vote titre à la « millepied ». Essayez donc : une saisons parisienne américaine. Dommage de gâcher un si bon article

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